Expression poétique personnelle, la poésie libre est empreinte de lyrisme et le sens du sacré y est omniprésent.
Thèmes privilégiés : l'évolution de la société, l'homme et la nature sacrifiés, la rêverie, les souvenirs d'enfance.
“ ... Et puis un jour - souvent lors d’une rencontre amoureuse, le cœur en émoi - la poésie vient à nous
et l’on écrit son premier poème ; puis la vie nous emporte sur ses grandes ailes et la poésie "elle", tombe dans les
limbes de l’oubli.
Mais si vous êtes poètes curieux d’âme et d’invisible, le chant intérieur "lui" ne meurt pas et tôt ou tard il va
chercher à refaire surface. Les mots sonnent à votre porte ils veulent exister, chanter l’Amour et la Révolte et
la Nature et les Hommes « TOUT QUOI », tout est sujet à faire de la poésie !
Seul avec lui-même l’imaginaire du poète nous égare, construit des univers, se joue de la camarde, dénonce les
injustices … il voudrait tant que le monde soit plus beau ! ”
Denis Lintz
"L'art ne fait que des vers, le coeur seul est poète" (André CHÉNIER)
Seul
le long des rivières
pas une âme qui vive
au travers du gris
sur le fil de brume
naissent … des lumières blanches
Lentement
elles glissent sur les eaux
viennent à lui
deux cygnes s’avancent
L’homme
sans bruit les contemple
un monde les sépare
.................................................
mais voici qu’ils dérivent
aux cascades du temps
au présent de l’instant
paradis des silences
Ecouter la poésie "Crépuscule" Humaines mémoires
Rosées de brume
premiers rayons de soleil
la vallée nous parfume
de mille senteurs
mille fleurs de foin
Fenaisons
Gestes ancestraux
mille fois répétés
faux et faucilles
- bat, aiguise la lame -
pierre sèche pierre trempée
et encore je vois et encore j’entends
mon père mon grand-père
… penchés sur l’ouvrage
les femmes ne sont pas en reste
ce sont elles qui fanent
chapeaux de paille râteaux de bois
elles sont belles … c’était hier
Aujourd’hui règnent les machines
elles vomissent de lourdes balles
qu’elles disséminent ça et là
au hasard des fauches
« Hasard le grand »
- on sent la main de l’artiste -
Le peintre ne s’y trompe pas
il y voit de rondes meules
- Van Gogh en herbe -
il installe son chevalet
rêve sûrement
se laisse emporter
… à quelques siestes amoureuses
Garçons sur la charrette de fer
c’est nous qui rangions les bottes
portées à bout de fourche
par les hommes en sueur
il nous fallait conduire doucement
le petit tracteur rouge
« le McCormick »
première lente
tout juste au pas de l’homme
Dans les greniers immenses
la tâche terminée
on jouait comme des fous
on faisait le parcours du combattant
les grands n’avaient pas froid aux yeux
ils auraient pu se casser en deux
Reste ce mystère
pourquoi nos pères, le bon fermier,
d’un geste de semeur-né
épandaient le sel à la volée
sur les foins précieux
les foins silencieux
… en attente de l’hiver
De meules en balles
de cheval en machines
non, que jamais ne meurt
la poésie des fenaisons
avant juste avant
« le grand chant des moissons »
Créatures et Créateur
Paysan des champs
Tu plantes borne à borne
Avoines et froments
A ton oreille l’argent sonne
As-tu seulement pensé
A la belle de mes pensées
A jamais dans ma mémoire
Son image se fait miroir
Toi aussi tu la connais bien
Elle apparaît sur tes chemins
En file indienne ses petits
De notre vie elle fait partie
Sa peur a le droit de vivre
Entre la balle du chasseur
Et la lame du faucheur
La créature se bat pour survivre
Notre-Dame Perdrix
Notre-Dame de cœur
Elle est un peu notre sœur
Où va-t-elle faire son nid
Ecouter la poésie "Créatures et Créateur" Racines
Les racines dans la terre
La couronne dans les airs
Un tronc qui se dresse
Un voyage de sève
Un seul et même arbre
Un seul et même homme
Me voilà par terre
certes j’étais un vieil arbre
plus de trois fois centenaires
ne faisant rien sur Terre
que de compter les étoiles
les nuits de pleine lune
je lisais dans les âmes
Pourtant j’aimais tant, les caresses du vent
celles qui faisaient chanter
toutes mes feuilles entre-elles
mes feuilles dorées
à la fin de l’été
Mais quand soufflait sa colère
seul je l’affrontais, et de face s’il vous plait
au premier éclair
je priais Mélisande
je ne suis qu’un bois tendre
une boîte d’allumettes
qu’on plante dans les marécages
les marais d’un autre âge
Un peu de soufre sur la baguette
un bois qui souffre dans les tempêtes
il casse comme du verre
disait mon grand-père
il a fait toutes les guerres
regardez bien ces éclats
au bout de ses doigts
la rouille noircit ses chairs
bientôt brisera
la hache qui le pourfendra
Pas de respect pour les Pépères
alors courez vite leur dire
à ces froids décisionnaires
que je ne suis pas mort
que je viendrai leur gratter le cul
au fond des cimetières
Ecouter la poésie "Un peuplier" Originelles
Le temps d'un passage
les voix du ciel, les sauvages
nous prennent
nous emmènent
sur d'autres rivages
Accrochées à leurs ailes
nos âmes nomades
un instant s'évadent
retrouvent leur ciel
As-tu déjà pensé à ton âme
à l'Invisible qui te réclame
Sous ton lourd macadam
bien trop loin des étoiles
toi l'homme des villes
des campagnes fragiles
de ton être tu t'éloignes
L'infâme mercantile
en toi se faufile
tu n'entends plus
... l'appel des grues
Photo~poème
De leurs mains
Pas une pierre
pas une essence qu’ils n’aient sculptées
pas une glaise qu’ils n’aient façonnée
sortie des carrières, des bois et forêts
sortie des tranchées
Matière vivante
Matière pensante
il nous faut la réveiller
il nous faut l’éclairer
et nos mains et nos cœurs
et nos joies et nos peurs
avant que n’apparaisse
enfin libérée de sa gangue
la précieuse forme en attente
rencontre amoureuse
Naissance
œuvre silencieuse
Présence
Ecouter la poésie "De leurs mains" Blanche
Seule dans le ciel
la lune éclaire la Terre
elle ne tombe pas
ceinte d'un halo de brume
elle est reine de la nuit
dans mon jardin paradis
le merle mène les choeurs
le roi soleil est ailleurs
je ne suis qu'une fourmi
Jeunes hommes
Disciples de Bacchus
Chercheurs d'ivresse
Vous faites fausse route
Gardez clairs vos esprits
C'est debout que l'homme est beau
Aux délires d'Epicure
Préférez les grandeurs de l'âme
Aux comas éthyliques
Les caresses orphiques
Les doux chants de l'amour
Vaillants chevaliers
Vos belles vos bien-aimées
Vous montrent le chemin
De paradis enchantés
De mondes insoupçonnés
En compagnons fidèles
Au-delà des plaisirs vulgaires
Des vieilles fanfaronnades
Vous trouverez des septièmes ciels
De sublimes escapades
Ecouter la poésie "Jeunes hommes"
Photo~poème
Ère solaire, premier acte
Les glaises s'écartent
en profondes crevasses
le soleil brûle
fend les terres du nord
les rues sont désertes
personne ne sort
mon puits est à sec
1976, 2003, 2015
le mercure toujours plus haut
toujours plus dingue
Moteurs, climatiseurs
rejets dans l'atmosphère
excrétions brûlantes
de chaud, les peuples crèvent
fondent les glaciers
les calottes polaires
montent les océans
La Terre est malade
l'Homme et la Terre ne font qu'un
il est lui-même malade
Profonds déséquilibres
combien devront encore souffrir
combien devront encore mourir
avant que cette humanité
prenne enfin conscience
des tristes réalités
l'heure est grave, l'avenir fait peur
Personne n'a le droit
de condamner les générations à venir
il nous faut agir
Le vieux modèle est périmé
pour eux, pour nous je vais changer
changer mes mauvaises habitudes
revenir à l'essentiel
la Vie, l'Air, l'Eau
nous n'avons qu'une seule Mère
elle s'appelle Terre
Aimons la Nature
aidons-là, respectons-là
Elle nous sauvera
Photo~poème
Enchantement
Je me promène en pleine terre
... et pourtant ...
je la sens ronde la terre
vaisseau qui traverse
l'espace et le temps
traînant, humaine déesse
sa cohorte de prétendants
Un souffle m'arrête
trahit quelques présences
me retourne les cherche
... un vol de mésanges se dispersent
mes anges, mes anges ...
Chuuut ! tout près si près
sur une brindille d'herbe sèche
tendrement
une nymphe se berce
[ Poème tiré du recueil : "De la plaine à la vallée" ]
Des hommes, les mêmes
Poussières de terre
Poussières de sable
Portées par les vents
Portées par le ciel
Ici se mêlent
Ici se sèment
Des déserts, les semences errantes
Les froides et lourdes glaises s’ouvrent
Aux ocres brûlantes
Senteurs de bois d’ébène
Sueurs des hommes noirs
Des hommes blancs la même
Sel de la terre
De ceux qui se donnent de la peine
Au travail, au respect de la terre
Un germe, un espoir
Des hommes
La Terre, un seul et même jardin
… un espoir pour demain
Musique en quatre saisons
Écoute
tomber la neige
dans ton cœur d’enfant
mugir le vent
dans les harpes de pin
Écoute
au sortir de la Terre
les murmures de la source
quelques notes de pluie
sur les eaux de l’étang
Écoute
les soleils d’été
mûrir le champ de blé
l’éternelle rengaine
des vagues océanes
Écoute
sonner l’Angélus
dans la toile de Millet
les concerts du silence
... les césures d’octobre
Écoute
au vivant de l'amour
… les musiques d’un « je t’aime »
Photo~poème
D'ici et d'ailleurs
Perdu
au fourmillement des gares
des aéroports
des villes gigantesques
« ogresses, mangeuses d’hommes »
il s’enfuit
se sauve de l’anonyme
rentre chez lui
auprès des simples
des camomilles sauvages
des bleuets, des sainfoins
Le champ de blé …
… bercé par les vents
aux soleils de juin …
… dore ses épis
Lourd tracteur, fumées noires
Dents d’acier, semoir
Le geste auguste du semeur
Rangé, mis au placard
Son image pourtant nous reste
Gravée bien claire
Tout au fond de nos mémoires
Elle est au semeur à l’homme droit
Marchant seul, sur son arpent de terre
Les graines brunes ou blondes
Portées en bandoulière
L’orge, l’avoine le blé
Son bras se balance
Au rythme régulier de son pas
Sa main, ses doigts touchent le grain
Il se laisse prendre
A la volée se disperse
Offrande à la Terre Mère
Au ventre de Déméter
Un vol de palombes grises
Recueille … la part des Anges
Demain
Ils ensemenceront le Ciel
Orion le grand accoucheur
Lui, fera naître
Des millions et des millions d’étoiles
[ A Jean Giono ] [ A Christian Signol ]
Rencontre
Voix vivantes
Voix d’au-delà
La tienne est là
Plantée dans nos ventres
Claire comme la source là-bas
Sa chaleur nous enchante
Donne le « la »
Dans ce monde contrebande
Près d’Aubenas
Sur la place bruyante
Au milieu de tes gars
La foule t’aimante
Assis à quelques pas
Les amants te contemplent
Dans tes yeux un éclat
C'est ton âme qui tremble
Seuls dans leur anonymat
Ils rêvaient de t’entendre
De partager avec toi
La montagne apaisante
Hommage à Jean Ferrat
Antraigues sur Volane
Ardèche - 1998
Ecouter la poésie "Rencontre" De l'autre côté
Courbé aux vents
la pensée dans mes pas
je m’évadais quand
transperçant les airs
le ciel m’envoyât
deux belles de passage
deux belles oies sauvages
Ensemble, elles claironnèrent
me sortirent de l’absence
me redonnèrent tous mes sens
… presque tous mes sens
instant précieux que cet instant
Filante, l’étoile au firmament
Et toi et moi et nous
Evolution du monde
Pollution, surconsommation
Les gens s’en fichent, ils en profitent
– Chacun à sa façon –
A tous les coins de rue
On entend dire
« C’est comme ça, on n’y peut rien »
Facile, trop facile
C’est une façon de s’en laver les mains
On peut tous faire quelque chose
Il n’y a pas de petites choses
La moindre action … fait changer le monde
Ecouter la poésie "Et toi et moi et nous"
Photo~poème
Poème... à la noix
D’un bec de corbeau
Ou même de corneille
Une noix vole dans les airs …
Bonne Fortune s’en mêle
« Vous ne mangerez pas cette noix
Je la destine à un homme »
C’est alors que l’oiseau noir
A son grand désespoir
Sent s’échapper de son bec
La délicieuse friandise
Son œil perçant suit sa chute
Telle crécerelle
Il fond sur sa proie …
Mais l’herbe est grande
La cache, à sa bouche gourmande
« Tant pis se dit-il grand seigneur
Je vais en quérir une autre »
Notre petite noix, toute retournée
Goûte la fraîcheur des mousses
« Grâce à elles se dit-elle
Je n’ai pas trop souffert
Et je suis bien mieux là
Que dans le ventre du trépas »
La terre de novembre
Encore chaude et tendre
Réveille en moi, le germe de vie
En deux mon corps se fend
« Ici, racine je vais prendre
Mère Nature va me nourrir
En son sein, je vais grandir »
Passent les saisons …
– La belle rencontre –
Au bas du verger
Il a vu ma jeune pousse
M’a reconnue, prise sous sa coupe
Protégé mon jeune corps
De la lame du faucheur
… Planté d’un beau tuteur
« Des grands vents du nord
Je n’aurai plus jamais peur »
Depuis, il veille sur mon bois clair
Comme sur ses propres chairs
Moi, j’étends ma couronne
J’affronte les hivers glacés
Les brûlures, les sécheresses
De ces fols étés
Heureusement, dieu merci je suis fort
Et, en cette année inclémente
Alors que mes frères noyers
Ont subi les fortes gelées
« Surprise je vais faire
A mon cher protecteur
Je vais lui offrir une noix
… Ma toute première noix »
[ A mon petit fils Naël ]
Mille neuf cent soixante trois
Au nord
la chambre glacée
le froid
entre par la fenêtre
les frêles carreaux se couvrent de givre
magie des arborescences
fougères des au-delà
– l’enfant immobile –
ses grands yeux s’émerveillent
Aux crépuscules de neige
fragile sentinelle
innocente vigie
il fixe le candélabre
la lampe de la rue
c’est elle qui révèle
les premiers flocons
ceux même qui l’hypnotisent
l’emportent vers d'autres ciels
– mais il a peur –
il a peur qu’elle s’arrête
fartée, sa luge est déjà prête
… sur le versant des forêts de la Dame
un grand chêne l’attend
[ A ma fille Gaëlle ]
Ecouter la poésie "Mille neuf cent soixante trois"
Photo~poème
Bel canto
Pas de mains
toujours pas de mains
pour construire nos nids
que nos becs
nos tout petits becs
nos becs à tout faire
nos becs à écrire
le mien est jaune d'or
m'avez-vous reconnu
- rescapé -
je viens juste de revenir
mon chant haut perché
je vous l'offre tout entier
qu'il égaie encore et toujours
la tristesse de nos mauvais jours
à mon ami le merle
- victime de l'épidémie -
Sécheresse
J’arrosais mes jeunes arbres
– ils étaient en train de mourir –
de l’autre côté du mur
eux s’ébattent dans les eaux claires
la piscine de marbre
ils n’entendent pas
palpiter le cœur des arbres
Soleil de plomb
Je porte le dernier arrosoir
au fond du ru des basses terres
il ne reste qu’une flaque
l’eau est toute noire
elle porte le voile du deuil
Ecouter la poésie "Sécheresse"
Photo~poème
Hubris
Saison après saison
Dame Nature
vit son éternité
l'homme s'y trouve mêlé
pour une poignée de secondes
par on ne sait quel sortilège
ou quel beau privilège
s'en montre-t'il digne
il la protègera
s'en montre-t'il indigne
la vérité est là
l'homme est un souillon
à la démesure
toujours il succombe
Photo~poème
Dominicale Messine
Novembre sur la ville
Balade pour chasser l’ennui
Un homme place Mazelle file
Voici que je pense à lui
Vieille connaissance
Du temps des cravates-colliers
Vingt ans se sont écoulés
Il garde le sien, je pars en errance
Pensées vagabondes
Et déjà la nuit tombe
Réverbère de l’esprit
Non, non ce n’est pas lui
Quai du Rimport
Longe le bras mort
Le temple s’illumine
L’île aux amours ses cygnes
De bronze, Lafayette le Poilu
Gardent l’esplanade
L’Arsenal est en vue
S’achève la promenade
La guerre s’expose
Les photos nous implosent
On repart défait
Philippe, au pied de l’escalier
A ton bras tout le charme d'Yvonne
Pour toi l'heure de la retraite sonne
Te voilà libre à présent
De penser, d'agir autrement
– Metz –
« De surprise en surprise »
Pour nos amis Philippe et Yvonne
Trouble
Pont de bois pont de fer
Fragile passerelle
Sans cesse
L’eau coule sous le pont
Tantôt l’amont, il regarde derrière
Tantôt l’aval, il regarde devant
Dans le courant du présent
Un homme se perd
Ses yeux cherchent le fond
Le tréfonds de son être
Du … d’où je viens ?
Du … où je vais ?
Du … que fais-je ici ?
Photo~poème
[ Huile sur bois 90x60 ~ D.Lintz ]
Svoboda *
Prêt à tout
Revenir au pays à tout prix
être avec les siens
sous les bombes
dans le froid
dans la faim
au ventre la peur
mais être avec les siens
pour que la flamme demeure
la flamme de l'espoir
- indestructible -
Former tous ensemble
la résistance ultime
contre l’oppresseur, le dictateur
Prêt à tout
plutôt mourir
que de perdre ce besoin vital
Tout homme le porte en lui
dans le sang de ses veines
- L I B E R T E -
Drapée de jaune et de bleu
une statue
éclaire le monde
(* Liberté en Ukrainien).
Photo~poème
Richesses passées
De La Neuville
au cœur du village fleuri
la ferme n'est plus
il nous reste l'ancienne tour, épargnée
sa porte cochère
restaurée à l'identique
A son dessous, bien alignés
les pavés font entendre à nouveau
le pas des chevaux
les cerclages de fer des carrioles
chargées de foins odorants
séchés aux vents
des ardents soleils de juin
Ils seront portés aux lucarnes
des mystérieux greniers remplis de vide
couvrant les écuries blanchies de chaux
aux vastes allées avenantes
aux portiques de fer forgé
sillonnées à la belle saison
du vol incessant, des chants
… de nos très chères hirondelles
Porte-bonheur du Ciel
à tous les hommes de la Terre
- aujourd’hui disparues -
La grande cour de l'enceinte, quant à elle
n’accueillera jamais plus
le bêlement des agnelets, des agnelles
de l'antique berger des lieux
… Rouletabille, où es-tu ?
Pas plus que le dandinement
des canes de barbarie
conduisant leurs petits
à la vieille mare nauséabonde
Fini, le bruit sec des coups de marteau
du maréchal ferrant
occupé à garnir les sabots
des courageux chevaux de trait
Percherons, Frisons ou Ardennais
Fini, le spectaculaire jour des moissons
et la monstrueuse batteuse
d'un certain père Haraut
- les larges courroies tournaient
flottaient dans le vide
hypnotisaient l'enfant que j'étais -
Spectateur attentif
je suivais les scènes successives, ininterrompues
- des hommes debout -
couverts de poussière, chargeant sans arrêt
la gueule béante de l'énorme machine
Les gerbes grisâtres englouties
finissaient en paille de litière
mais surtout ô miracle
en millions de grains de blé dorés
remplissant à ras bord
les lourds sacs en toile de jute noués
que les hommes, les géants
portaient sur leurs larges épaules
… sans même courber l'échine
Le dur travail accompli
la maîtresse de ferme au cœur tendre
… à l'âme servante
dressait la grande table blanche
parée de miches de pain
de cochonnaille, de piquette de vin
Aux hommes fourbus, fatigués
il n'en fallait pas plus
pour retrouver toutes leurs forces
oublier, l'enfer passé ...
(A ma fille Mélanie, ... à la ferme de notre enfance).
Photo~poème
De guerre les crimes
Armés jusqu'aux dents
sans retenue, aucune
les vainqueurs présumés
de conflits mortifères
- un jour -
trouveront sur leur route
les forces éternelles
d'une justice immanente
qui, quoiqu'il arrive
les brisera ... Rê
Balade du soir
ballade d’un soir
l’astre lumière
va quitter ma terre
ce n’est qu’un au revoir
L'espace d’un instant
sans me brûler les yeux
j’ai pu te contempler
ô toi, ô soleil couchant
voyageur d’éternité
tu es jeune
déjà je suis vieux
De fini en infini
La vallée s’étire
la rivière se devine
aux bouquets des saules
aux herbes sèches
blotties au pied des fils qui blessent
enferment les vaches blanches
Aux ventres des mères
les nouveaux nés se rassurent
l’innocence s’immacule
Plus loin
un village aux tuiles rouges
son clocher d’ardoises
son phare de nuit
Tourné au nord
le coq girouette se perd
aux vapeurs bleues
des collines et des bois
déjà sous l’emprise du ciel
Mariage ancestral
et de terre et de vide
l’horizon tire
sa révérence finale
vieille frontière
passer au travers
… je chausse mes ailes
Rivière ô ma rivière
Des croisées de ma fenêtre
Tu sembles immobile
Je sais pourtant que tu files
Que tu cours comme une folle
Creuser d’autres terres
Sentir d’autres cieux
Caresser ton onde frivole
Innocente
Le fleuve te prendra
Au confluent de ses bras
Gonflera sa poitrine d’atlante
Te roulera dans ses eaux impatientes
Te fera perdre les sens
Oublier même
Les sources de ta naissance
Ensemble
Au partage des eaux
Vous glisserez vers la grande mer
Peut-être même qui sait, vers l’océan
- Quelqu’un en décidera –
Mais seulement à l’estuaire
Vous croiserez les vents du large
Les embruns salés, les cris du goéland
Ecouter la poésie "Voyageuse" Spirit of St Louis
Gitanes
Fumées en volutes bleues
Perdues dans les airs
Silencieuses arabesques
Dernières traces de matière
Visibles
Puis invisibles
Emportées
Inspirées par les souffles
Le souffle des ailes
" Courrier sud "
" Vol de nuit "
" Terre des hommes "
" Le Petit Prince "
...
Cher Petit Prince
Qui réveille en nous
l'enfant qui sommeille
qui donne à l'homme
de si bons conseils
" L'essentiel
invisible pour les yeux
on ne voit bien qu'avec le coeur "
Ne jamais laisser
s'éteindre notre imaginaire
arrosons chaque jour
les roses, des petits, des grands amours
Faisons les choses pour rien
sans compter, sans toujours compter
accueillons à bras ouverts
les oeillets du poète
... ce sonneur de lune
... cet allumeur de réverbère
... à Antoine de SAINT-EXUPERY
Derrière la verrière
Bien au chaud
au creux du petit vallon
s'attardent les eaux tièdes
douces toisons
où nichent les oiseaux
Comme tombé du ciel
un vent d'amour s'y engouffre
promène son archet
sur les cordes tendues
de l'innocente Roselière
Voici qu'ils se balancent
au son des musiques qui dansent
se dressent
en brusques saccades mugissantes
marquent la cadence
ondulent
en vagues déferlantes
vacillent
au point d'orgue, s'immobilisent
Le souffle se retire
serpente dans les herbes tendres
dessine
la trace de son souvenir
Ecouter la poésie "Derrière la verrière" Solitaires
Les ventres des forêts
ne sont pas faits pour les foules
pas plus que les hautes mers
les mourantes banquises
les paradis blancs
ils sont pour les voyageurs
les ermites au grand cœur
les penseurs extrêmes
les amis du vent
ceux qui n’ont pas peur
pas peur de la houle
des violentes tempêtes
des colères du ciel
de l’âme qui se brise
ceux qui n’ont pas peur
des hordes de loups, de l’ours polaire
des griffes de l’ennui
longs silences amers
le chant de mes-anges
décibels d’un je t’aime
à Jacques Brel, Sylvain Tesson, Vincent Munier
Ecouter la poésie "Solitaires" Fol été
Eole enfin se lève
fait naître à l’horizon
mille gerbes d’éclairs
trois cents coups de tonnerre
pour chaque goutte de pluie versée
chaque goutte de vie donnée
Offrande de Ciel
à la Terre-Mère
- elle implorait –
C’est tout le vivant qui t’attendait
toi la nécessaire, toi l’indispensable
sans qui le vert disparaît
pour le sec
le cassant des feuilles mortes
le feu dans les épines de pin
et puis un jour ... le sable
Homo sapiens sapiens
regarde derrière
c’est ainsi que naissent les déserts Migrantes
Toutes voiles de vent
D’ailes de chants
Mille vagues de grues
Déferlent dans le ciel
S’attendent, tournoient
Construisent, reconstruisent
La proue du navire
Pour aujourd’hui fendre les airs
Mais demain
Cœurs d’hommes, matelots et marins
Trois-mâts, caravelles
Ensemble
Vous irez fendre
Ô Saintes Marie de la mer
Des paradis peints en bleu
D’insondables océans
Ecouter la poésie "Migrantes"
Photo~poème
Cataracte
La mort est dans les airs
La mort est à nos portes
Ton énergie n'est pas propre
Ô centrale nucléaire
Vous les magnats du kilowatt
Vous les marchands d'atome
L'uranium vous a assez enrichi
Arrêtez on vous en supplie
Vous menacez la vie de l'Homme
Vous menacez la vie de nos mômes
Déchets nucléaires
Vous pourrissez le coeur de la Terre
Arrêtez de nous mentir
La bonne fée électrique
N'est plus qu'une bombe atomique
Le pire est à venir
Hiroshima, Tchernobyl
ça ne vous a pas suffi
Maintenant c'est Fukushima
La mort a remplacé la Vie
La Nature et les Hommes sont irradiés
Les Enfants vivent enfermés
Malheureux survivants
Honte aux gouvernants
Le Japon a perdu ses Jardins
Sur sa Terre il ne pousse plus rien
De grâce Seigneur écoute ma prière
Arrête à jamais l'arme nucléaire
Ecouter la poésie "Cataracte" D'hier et d'aujourd'hui
Les écorchés vifs
saignent au dehors
saignent au-dedans
ne cicatrisent jamais
Chantres de l’amour
chevaliers de justice
porteurs d’idéaux
Ils rêvent de partage
de monde meilleur
d’eau et d’air purs
de paix de silence
… et de chants d’oiseaux
Ecouter la poésie "D'hier et d'aujourd'hui" Noces
Indifférent
à la folie des hommes
le petit ruisseau
fredonne quelques chants
caresse les fils racines pourpres
des saules immobiles
les verts, les jaunes des mousses
aux herbes courtes
... se marient
Oui, je retournerai
à la source du petit coteau
nos lèvres se sont touchées
un lien secret nous unit
Oui, je te construirai
un mur de silence
contre le vacarme des routes
Oui, je te couvrirai
de mousseline blanche
contre les souillures immondes
Et sans autres effets
que nos vivantes solitudes
au plus froid de l’hiver
prisonniers de nos manteaux de glace
je viendrai nous consoler
Éros
La folie amoureuse
Sous les coups de l'horloge
Résiste et puis se loge
A son achèvement
Dans cette ride bienheureuse
Qu'est la tendresse des amants
Ecouter la poésie "Eros"
Photo~poème
Des mains
Des mains pour faire le pain
Préparer la terre, semer le grain
Des mains pour construire sa maison
Allumer le feu, couper le bois
Des mains pour filer la laine
Tisser l’habit, combattre l’ennui
Cueillir les fruits de la Terre
Jeter les armes de guerre
Des mains pour des poignées de mains
Des mains pour effleurer ta joue
Des mains pour préparer le repas
Des mains pour tailler la vigne
Protéger la Terre
Déconstruire les centrales nucléaires
Des mains pour boire à la source
Laver son corps et son âme
Des mains pour peindre la toile
Sculpter la pierre, faire courir l’archet
Faire vivre la page blanche
Ecrire des mots d’amour
La lettre du père Noël
Des mains pour éteindre la télé
Ouvrir des portes, faire la ronde
Des mains pour la main de l’enfant
Pour lire dedans, offrir un présent
Gagner honnêtement sa vie
Donner la pièce au mendiant
Des mains pour caresser le chien
Apaiser la douleur des corps
Des mains pour soutenir le vieillard
Bénir la tombe du mort
Des mains … pour mettre au monde l’enfant
Ecouter la poésie "Des mains" Servantes
Penchées sur les lourdes dalles
Les cireuses de pierres tombales
Ecoutent leurs mères défuntes
Derrière les voix du silence
Peut-être même qu’elles entendent
Du chant des âmes les plaintes
Le rossignol et la rose
Arrivé au port
Dans le dernier corps
Les yeux fermés
La bouche close
L’étincelle lumineuse
A l’étoile se rallume
Le souffle de Vie
Au vent se remarie
L’âme à l’Esprit
Brûle sa flamme
L’Amour de nos cœurs
A la rose s’exhale
Eglantine
Chante, chante rossignol chante
Photo~poème
Barrières
Les mémoires entassent
Des haines tenaces
L’histoire n’est faite que de guerre
La Terre emmurée de frontières
Elle n’est qu’une pourtant
Depuis la nuit des temps
Ses enfants l’ont oublié
Oublié le sens d’Humanité
Les mémoires entassent
Des haines tenaces
Effaçons les noires ardoises
Arrêtons de nous chercher des noises
Déchirons tous nos atlas
La Terre les Hommes une même race
Offrons nos ombres à la lumière
Partageons le bon pain de la Terre
Aimons de tout notre cœur
Les hommes Tous, frères et sœurs
Ecouter la poésie "Barrières" Mademoiselle Amélie
Il orne la tombe vulgaire
De menthes odorantes
Son âme a fui le cimetière
Son souvenir me hante
Mais passant, que sais-tu d’elle
La pierre parle d’enseignante
Une belle Demoiselle
Une maîtresse... une amante
A l’école communale
Elle est mère elle enfante
Nos mémoires adolescentes
Petites âmes sentimentales
Pour un peu de son savoir
On conjugue l’auxiliaire avoir
A tous les temps de l’imparfait
On croit que c’est elle qui sait
Fini le vent dans nos sandales
Adieu bel être original
A trop compter avec aisance
On a perdu l’esprit d’enfance
Peut-on un jour le retrouver
Ce paradis des tendres années
Ce monde où tout est innocence
ô temps béni de l’insouciance
Photo~poème
Mozarire
De ma vieille boîte à souvenirs
Quelques mots se sont échappés
Ils me reviennent comme un soupir
D’une mère à l’enfant que j’étais
Ils sentent bons la chandeleur
A mardi gras c’est carnaval
Elle souriait dans son chandail
« Déguise-toi donc c’est pas banal
en coin de rue, en soupirail »
Des mots qui chantent des mots à rire
Arrivent avril et ses poissons
« Va donc chercher l’marteau
à enfoncer l’clou des saisons »
Le village sourit dans mon dos
« Poisson d’avril pour l’imbécile »
Il serait bien tombé d’la lune
Ce doux rêveur à l’âme blanche
Tourne la roue de la fortune
Il connaissait la paix des anges
« Chante-sonne crécelle »
Deux nids de paille dans le jardin
Un lièv’de pâques au p’tit matin
Le frêle enfant aime sa maman
Dans un des nids … la clé des champs
Photo~poème
Riches de terre
Nous les aristos
Du peuple d’en bas
Notre particule
N’est pas majuscule
Juste un nom commun
Venu d’un métier de mains
Un ancêtre laboureur
On l’appelle Lesemeur
Dans les champs du hobereau
Résonnent encore ses pas
Il marche dans la raie
Trace le sillon
Six chevaux pour un fer
La terre ne se laisse pas faire
Il lui faut ceindre ses reins
Et avancer debout
Le ciel à l’horizon
La joie à l’autre bout
L’homme est en paix
Un bol de soupe, un verre de vin
Il plante la graine d’épeautre
Pas pour lui, mais pour les autres
Déméter
Et l’automne se pose
Mille fils tissés de mille gouttelettes
Relient et veillent
Les blés d’hiver en paillettes
Trame argentée froide terre mouillée
Pas un souffle de vent
De longs roulements couvrent
L’éternel silence
De la vallée endormie
Un lointain soleil verse sa lumière blanche
La rivière est grosse, bouillonnante, opaque
Les chemins lourds, défoncés pleins de flaques
Les rouges aubépines, les églantines
Vermillonnent la toile verte de gris
Quelques accents dorés trois branches de gui
Sur l’autre rive, de l’autre côté
L’île aux oiseaux résonne encore
Et des chants du rossignol
Et du printemps de l’amour
Ses flûtes enchantées
Là-bas, le saule « limite »
Attend une visite
L’aulne solitaire
A l’inaccessible t’invite
– Vallée de la Seille –
Pouilly près de Metz
Photo~poème
Tempêtes
Les tempêtes du ciel
ont mille visages
De montagnes de dunes
en roses des sables
les sables du désert
ne sont plus qu’un mirage
Les tempêtes du ciel
ont mille visages
Sous l’œuvre des vents
les coulées de neige se rangent
bâtissent en hautes congères
des cathédrales, des muses blanches
Les tempêtes du ciel
ont mille visages
Un peu de leurs souffles
et les poussières d’étoiles s’aimantent
un souffle à chacun
la vie, la vie dans nos mains
Les tempêtes du ciel
ont mille et un visages
A la fin des orages
naissent des arcs-en-ciel
ils relient la part manquante
à l’Invisible, caché dans nos ventres
Dô *
D’oxyde de fer
en laisser faire
le train-train quotidien
déverse ses vapeurs grises
vieille locomotive
elle tire en ribambelle
ses drôles de wagons
– tous ces jours qui passent –
les roues frottent le rail qui les guide
elles s’usent doucement
mais toujours
gardent leur brillant
Chemin de fer, chemin de verre
la Voie, nous emmène loin
bien plus loin
au plus profond de nous-mêmes
au moyeu de la roue
humble vase rempli de Ciel